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 Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé]

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MessageSujet: Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé]   Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé] EmptyLun 26 Sep - 1:24

Wickford Mary Ann



Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé] 1131666199

Axis Power : Hetalia feat. Hungary
    IDENTITÉ :


    Lycan
    Nom : Wickford
    Prénom: Mary Ann Rosalyne
    Age Apparent: 18 ou 20 ans
    Age Réel :22 ans
    Sang-Pur/Mordu/Infant : Comment nomme-t-on la fille d’un mordu et de sa maîtresse ?
    Date et Lieu de Naissance : Un 22 avril dans un manoir près de la mer.
    Orientation Sexuelle :Hétéro
    Nationalité: Française malgré ses origines anglaises
    Groupe : Lycan
    Classe Sociale: Hum…je ne sais pas trop. Je peux vous laisser décider ? (Peut-être de la bourgeoisie ?)




Description Physique :

Une jeune femme se tient appuyé sur le bastingage d’un navire. Ses longs cheveux bruns se balancent au gré de l’air salin. Ses pensées sont aussi furtives que l’oiseau marin qui plane au loin. Tapotant sa joue rosie par la fraicheur matinale de ses doigts fins et longs, elle essaie tant bien que mal de rester immobile, craignant la voix autoritaire du peintre qui la ramène toujours à l’ordre.

« Mademoiselle ! Mademoiselle ! Vous serait-il possible de cesser de vous tortiller pendant que je croque votre portrait ? Non, mais regardez-vous ! Non, cette lumière ne vous va pas du tout. Tout l’éclat naturel de vos yeux disparait sous cet éclairage. Mettez-vous plus sur l’avant du pont. Non, pas de discussion ! Obéissez ! Voilà, c’est ça. Ne bougez surtout pas ! Tournez vos yeux vers la clarté de l’eau et… »

Le peintre commence son œuvre. D’un mouvement habile, il trace l’ovale allongé du visage de sa muse et approfondit l’ombre doucereuse de son menton marqué. D’un coup de pinceau, il représente la vie dans ce regard si hypnotisant. D’immenses yeux verts, héritage du père de la jeune femme, prennent place dans le tableau. Aussi ronds que la lune et plus pénétrants que les prunelles d’un chat. Le peintre peine à immortaliser sur sa toile, ces deux émeraudes à l’éclat vif, mais innocemment rêveur. Ceux-là même qui vous laissent tantôt perplexe, tantôt étonné. Un jour, ils vous regardent, tremblant d’émotions et en vous dévoilant tous ces murmures dissimulés. Les miroirs de l’âme à ce qu’on prétend…Cependant, dès le lendemain, vous pourriez tenter vainement d’y plonger votre esprit, jamais vous n’y trouveriez quelque chose. Miroirs opaques à ce qu’on dit…Mais comment un simple artiste pourrait-il recréé tout cela sur une vulgaire peinture ? L’art ne peut remplacer les émotions humaines…L’homme inspiré peint le contour de ces lèvres discrètes…lèvres qui sont loin d’être pleines ou charnues. Elles sont simplement là, donnant un air timide incessant à la jeune femme tout en renforçant cette impression de fragilité. Une touche de rose nacré et voilà qu’un sourire se dessine. Il est à peine visible, mais il rajoute une touche de charme à la dame de peinture. Dommage que peut de gens y prêtent attention…Un coup de pinceau et des sourcils arqués apparaissent sur le portrait. Leurs présences n’étant exigées que pour camoufler les autres traits qui offrent un air juvénile à la demoiselle. Passons maintenant rapidement sur ce teint crème malgré ces longues heures passées sous le soleil à l’avant d’un navire, ces joues naturellement rosies donnant une mine faussement émerveillée, ces cils recourbés et ce nez légèrement et presque imperceptiblement retroussé. Non, ces détails sont sans importance. Voyez plutôt le peintre s’attarder sur cette longue chevelure brune. Il se mord les doigts à essayer de trouver la bonne couleur, mais il suffit que la jeune femme fasse un pas pour que des reflets brillent au soleil. Comme c’est contraignant…Sont-ils bruns foncés, pâles ou auburn ? Dans la froideur et le gris de l’hiver, ils seront sans doute d’un brun foncé…mélancolique, mais sous les rayons de l’astre du jour, lors de la saison estival, vous verrez un ballet de brun et d’auburn, encadrant le doux visage de Mary Ann. Sous la danse de ses mouvements, il se forme une cascade chatoyante et interminable qui fait perdre la tête à la plus éprouvée des servantes chargée de coiffer la demoiselle. C’est pourquoi, cheveux libres sous un fichu volage, chignons aux mèches éparpillés, boucles satinées servant d’attaches ou dans les moments les plus osés, chevelure sans artifice sont de mises. Bien sûr, le peintre a conseillé à la jeune femme de choisir sa plus resplendissante parure pour son immortalisation. Ainsi, on l’aperçoit avec un magnifique serre-tête serti de fleurs parfumées.

Le magicien au pinceau continu son œuvre, délaissant le haut de l’effigie pour se concentrer sur la silhouette. Il dessine un cou à l’allure digne, mais ne lui adoucie-t-il pas les contours ? Cherche-t-il à rappeler un cou de cygne ? Ensuite, il s’attaque aux formes. Cette fois-ci, il n’a nullement besoin de camoufler un vice. Son œil juste et observateur convint que celles de la demoiselle sont d’une dimension fort acceptable. Jamais, elle n’aura besoin de jalouser une de ces grandes dames fortement admirées par la société pour leurs atouts charismatiques. L’artiste de plus en plus charmé admire son costume. Non, il ne possède pas de détails extravagants ni de broderies interminables coulées dans un fil d’or, mais son inspiration le porte comme une reine, avec un port de tête fier et déterminé. Ses habits sont simples, mais élégants. Sa robe retouchée maintes fois pour faciliter ses déplacements sur les ponts des embarcations. Le peintre contemple son œuvre. La femme qui y est représenté n’attire sûrement pas tous les regards, elle n’est pas non plus époustouflante ou longuement admirable, mais elle n’est guère repoussante ou imperceptible. Ses mains écorchées sous les travaux restent délicats et démontrent qu’elle sait se retrousser les manches. Oui…le peintre est fier de son travail ou du moins de ce qu’il a commencé, car il est conscient que la demoiselle est loin d’avoir fini de s’épanouir. Cependant, il ne se doute point que la jeune femme est presque le sosie de sa génitrice à quelques exceptions près. Mary Ann ne détient point de traits sauvages comme sa mère et ses yeux restent un des merveilleux cadeaux que lui à légué son paternel.

L’artiste ne connait pas non plus le si malicieux secret de la demoiselle. Elle, qui dispose d’une stature si frêle de jeune enfant et elle, qui n’est pas plus grande que la plupart des dames, cache pourtant un atout hors du commun. Lorsque la pleine lune étend sa douce lumière au-dessus de la ville que se déroule-t-il exactement dans le manoir Wickford ? Oui, qu’arrive-t-il quand la louve remplace l’être humain ? Ongles deviennent griffes et dents deviennent crocs. Louve toute en finesse et en rapidité. Elle ne compte pas sur sa taille, mais sur ses pattes agiles et puissantes. Tel un éclair auburn, elle bondit plus qu’elle ne court avec agilité et liberté. L’existence n’a guère de limites infranchissables.





Description Mentale :

Qui es-tu ? Chuchote l’ombre. Qu’entends-tu ? Souffle le vent. Que voies-tu ? Demande l’aveugle. Qu’en penses-tu ? Dit l’esprit. Que sais-tu ? Questionne le sage. Que comprends-tu ? Interroge le savant. « Une fleur, c’est jolie. » Répondrait toujours l’enfant. « Je ne sais pas…il faudrait que j’y réfléchisse… » Dirait l’adulte qui ne cesse de chercher des réponses inutiles. « Hier, je t’aurais répondu. » Murmurerait le vieillard las de sa vie qui s’écoule. « Les lumières aux questionnements viennent seulement en priant. » Mentirait le faux croyant. « Les réponses ne sont visibles qu’avec l’œil qui voit par le cœur. » Philosopherait celui qui a foi en la vie. « Je n’ai pas le temps pour de telles balivernes. » S’offusquerait le noble. « Je ne jure que par les armes. » Débiterait inutilement le général.

~ Mais toi, ma jolie petite Mary Ann, que nous raconterais-tu ? ~

« Je suis ce que je suis et jamais personne ne me changera. » Phrase que se répète inlassablement la jeune femme pour se donner du courage dans les moments les plus difficiles. Elle vit la vie d’un pied dansant, affrontant ce qui se dresse devant elle, une étape à la fois. L’orgueil est chez-elle son défaut le plus flagrant. Elle ne ravale sa fierté quand dernier recours et cela, en jurant toujours qu’elle aurait sa revanche. Courber l’échine la fait toujours énormément souffrir, car elle considère cela comme un échec, une faiblesse dévoilée à ses ennemis. Devant les épreuves, elle sait garder la tête froide peut-importe les circonstances. Malheureusement, sa détermination lui joue parfois de bien vilains tours. À force de toujours prendre appui sur elle-même, la demoiselle s’isole volontairement dans sa forteresse de cristal. Dans sa logique irréparable, elle croit que si moins de gens l’approchent, moins de chances il y a qu’elle soit blessée. Sa seule réelle confidente reste sa chère Nanie. C’est une femme de caractère qui provoque bien des sueurs froides chez ses compétiteurs qui se rongent les sangs à se demander où elle ira frapper la prochaine fois. Diriger tout un petit monde, cela peut être éprouvant surtout quand la majorité des employés sont des hommes avec des préjugés obscènes sur les femmes, allant jusqu’à cracher sur leur passage. Petit à petit, la fille du Capitaine, c’est forgé une réputation de dirigeante sévère et de concurrente impitoyable. Dans le monde des affaires, rien n’est à prendre avec des gants de soie.

Pourtant la gouvernante connaît bien la vérité. Derrière le cœur de pierre, se cache un cœur de plâtre. Combien de nuits s’est-elle glissée à pas feutrés jusqu’à la chambre de la demoiselle Wickford pour y entendre des sanglots étouffés ? Quand la nuit vient, la jeune femme ne sait recoller son cœur qui se fissure, alors le chagrin vient soigner ses plaies. La mort de son père, l’abandon de sa mère avant même de la connaître, la menace de son oncle, les tourments occasionnels de la vie, ses transformations en louve et les révoltes de ses marins trop conformistes, voilà des choses qu’elle ne peut contrôler. Et, Mary Ann déteste perdre le contrôle. Elle aimerait tant être encore une enfant qui joue sur les genoux de son paternel, mais ce temps est révolu. Dommage qu’elle ait oublié comment se confier à quelqu’un…

Intelligente ou sournoise ? Rusée ou manipulatrice ? Je ne saurais le dire. Mary Ann préfère s’effacer, rester dans l’ombre. Il est difficile de la cerner. Non, elle n’est pas plus sage ou futée qu’une autre. Elle n’a pas une force ou une rapidité révolutionnaire, pas plus que les autres lycans en tout cas. Elle enferme seulement sous un verrou sa sensibilité, son innocence et sa compassion. Cependant, ils sont toujours là, présents en elle…Un gamin qui pleure tant il a faim sur le bord de la route et la jeune femme ne pourra refouler son envie de lui donner une pièce. Au fond, c’est une dame comme une autre. Avec ses vices et ses espoirs, refoulant ses joies enfantines, car derrière ses façades trompeuses d’âmes insensibles, on trouve en elle un véritable cœur d’enfant. Occasionnellement, sa véritable nature refait surface et la jeune femme ne peut s’empêcher de rire pour un oui ou pour un non, de danser sur un air invisible ou de chantonner pour son simple plaisir. Elle aimerait tant pouvoir verser des larmes de joie et cesser de jouer le rôle de la dure à cuire pour un temps ou reposer ses rêves déjà bien fatigués, alors qu’elle est toute jeune.

Meurtrière de sang froid ? Non, jamais. Mary Ann garde toujours des regrets pour ses victimes qui trépassent sous ses griffes. Mais y peut-elle quelque chose ? Le fait d’essayer de ne tuer que des clochards ou des solitaires explique-t-il ses gestes ? Avec les années, elle a appris à différencier la louve et l’être humain qui combattent en elle. Qui a tord et qui a raison ? Elle ne sait pas ou ne sait plus. Maintenant que son père n’est plus là, qui voudrait lui montrer la bonne voie ? Que fait-on si on ne peut se tourner vers Dieu ? Mary Ann se raccroche désespéramment à la fillette qu’elle était autre fois. Son insouciance lui manque terriblement. Ses plus merveilleux moments de joie sont sans conteste ceux passés sur la mer. L’amour de sa vie…c’est la mer. Celle a qui, elle souffle toutes ses inquiétudes, ses secrets et ses doutes. Jamais l’immensité bleue n’irait dévoiler quoi que ce soit à quelqu’un, alors la jeune femme se penche pardessus bord et elle chante tout ce qu’elle a sur le cœur et la conscience à son amie. D’ailleurs, elle a une voix très agréable à l’oreille qui sonne comme des clochettes annonçant le printemps.

Alors qui est Mary Ann ? Je pense bien vous avoir mêler plus qu’autres choses. Enfaîte, je ne sais pas vraiment qui elle est, mais peut-on vraiment décrire quelqu’un ? Dévoiler chacune de ses facettes, ses couleurs ou ses idées ? Peut-être vous aie-je raconter qu’un tissu de mensonges purement inventer par des médisances ? Enfin, il ne vous reste plus qu’à la rencontrer dans la rue et de lui adresser la parole si vous voulez la déchiffrer. Allez-y doucement, elle n’est pas du genre à papoter avec n’importe qui. Bon, il est vrai que mon avis est franchement fautif. Qui suis-je pour oser prétendre tout connaître chez cette femme ?






Derrière l'écran:

Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé] 838021imagederrirelcran

    Pseudo :Malys
    Age:On va simplement dire que je n’ai pas 20 ans.x)
    Comment t'es-tu retrouvé parmi nous?: Je crois bien que c’est un partenariat, mais je ne sais plus trop. J’ai le fow dans mes favoris depuis un bout.
    Des Remarques ou impressions? J’espère que mon niveau de rp va suffire pour le forum, car il me semble habité par de très bons Rpeurs. D’ailleurs, je trouve le design génial.
    As-tu lu le règlement ?Oui.
    Code du règlement :Okay by Meli




Dernière édition par Mary Ann Wickford le Lun 10 Oct - 18:42, édité 2 fois
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MessageSujet: Re: Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé]   Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé] EmptyLun 3 Oct - 12:08

Biographie :

Dans la demeure familiale des Wickord, près du feu, une vieille dame usée par le temps veille sur celle qu’elle considère comme son enfant. Ses aiguilles à tricot cliquètent sous les mouvements habiles et habitués de ses mains de plus en plus rigides sous l’apparition des premiers signes de rhumatisme. Le soleil se couche derrière les rideaux de satins et l’âgée savoure avec contentement ces quelques heures de plénitude qui lui sont accordées entre la fin de la journée et les douze coups de minuit. Minuit…l’heure du diable…l’heure de la mort. Cette pensée amuse la tricoteuse. Elle en a vu de toutes les couleurs dans sa longue vie. Des vertes et des pas mûres comme on dit. Pourtant, sa foi en Dieu reste inébranlable. Pourquoi ? Et bien, il faut croire en quelque chose si on veut s’accrocher malgré les épreuves de l’existence. Chaque étape apporte l’expérience nécessaire à la prochaine étape. Elle, Nanie comme on la surnomme, elle affronte tout. « Aucun vent ni marée ne parviendrait à bout de toi, ma chère Nanie. » Cette phrase, le capitaine lui répétait souvent tandis qu’elle effectuait ses tâches routinières et quotidiennes. Ce sympathique capitaine…il ne s’est jamais douté qu’elle en savait bien plus qu’il n’en laissait paraître. Elle avait quoi ? Presque trente ans quand elle était entrée à son service comme gouvernante ? Elle l’avait suivi dans tous ses échecs, ses vices et ses triomphes. Elle qui n’avait jamais eu la chance d’avoir une véritable maisonnée, née dans une famille pauvre et qui ne s’en remettait qu’au salut du Seigneur. C’était une aubaine tombée du ciel ce travail ! En plus, le capitaine dans sa petite vingtaine, il était on ne peut plus fringant et beau jeune homme. Néanmoins, elle l’avait toujours considéré comme un vieil ami avec qui on partage nos calvaires et nos réussites aussi minuscules soient-ils. Dommage que tout ait une fin…La vieille femme se souvenait encore du boulanger qui lui criait chaque matin lorsqu’elle allait chercher le pain frais du jour : « Hey ! Ma p’tite Nanie, vous v’nez chercher du pain et des brioches pour not’e capitaine Bébert ? » Et elle, elle répondait toujours : « Plutôt deux fois qu’une mon bon monsieur. Croyez-moi, c’est le Tout Puissant qui l’a mis sur ma route…ainsi que vos p’tits gâteaux. » Et là, ils partaient tous les deux à rire. C’était le bon temps et elle avait encore toutes ses dents. C’est qu’il lui manquait son capitaine. La gouvernante soupira. Combien de fois encore le nom de la famille Wickford allait-il être chamboulé ? Dire que tout reposait sur les épaules de sa jeune protégée. Au moins, elles étaient solides ces épaules-là. Mais aller savoir si elles résisteront aux tempêtes ?! Reposant son tricot sur le coin du fauteuil presque aussi vieux qu’elle, Nanie se penchait vers le feu pour y plonger son regard. Ce regard qui, malgré toutes ces années, reste encore aussi pétillants que dans ses folles années. On peut même y lire toute l’histoire. Une histoire parmi tant d’autres qui touche, qui blesse. Un conte de fée du temps présent ou un simple récit juste bon pour les sombres coins de tavernes ? Qui pourrait vraiment le dire ? Surtout pas Nanie, d’après elle. Elle, elle n’est qu’une figurante, un pantin articulé par le destin et qui sert parfois de bouée de sauvetage aux tristes naufragés. Mais pourtant, ce soir, elle prend la peine de se souvenir. Du début jusqu’à la fin ou plutôt le présent. Il lui manque des éléments, des trous dans son récit comme si elle touchait du doigt la vérité, mais était incapable de la saisir. Une vérité qui fait mal ou qui terrifie ? Ce n’est pas vraiment de ses affaires. Seule l’héritière des Wickford a le droit d’être la gardienne des secrets familiaux et Nanie est bien contente de ne pas en porter le poids de la responsabilité. Avec un peu de chance, pense-t-elle, toutes ces vilaines cachotteries et tromperies disparaîtront avec la mémoire de ses possesseurs. C’est là que tu te trompes ma chère Nanie. Moi, je les connais ces quatre vérités et je suis bien déterminé à tout raconter. Alors mes amis, ouvrez grand vos oreilles, votre fidèle narrateur va vous citer une belle histoire d’amour, de regrets et de trahisons. Avouez que chacun de vous en raffole. Je vous connais bien petits nobles et bourgeois bien assis dans vos sièges de velours, vous adorez tout ce qui vous rappelle la misère que vous ne subissez pas. Donc, je commence par il était une fois…

Il y a des années de cela, Charles Wickford émigra de l’Angleterre jusqu’en France avec sa femme, ses deux fils et leurs modestes possessions. Pourquoi ? Et bien, Madame Wickford était originaire de ce beau pays et une de ses tantes récemment morte lui léguait une maison et un terrain situé près d’un port. Charles était marin, mais il ne possédait pas de navire et ne voyait pas comment il pourrait un jour avoir l’espoir d’être nommé capitaine d’une frégate. Ramassant par-ci par-là, les petits boulots sur différents bateaux pour subvenir aux besoins de sa famille. D’ailleurs, celle-ci le suivait dans chacune de ses aventures et cela au grand damne de l’aîné, Frank, qui détestait la navigation et les roulis incessants des vagues contre la coque des embarcations. Il avait le mal de mer voilà tout. La famille n’ayant pas vraiment d’attache ni d’habitation vivait au gré des contrats de l’homme de la maison. Imaginez quel soulagement fut ressenti quand madame Wickford reçut cette fameuse lettre concernant le testament de sa tante. Sans aucun regret, Charles quitta l’Angleterre espérant ainsi donner une nouvelle vie à ses êtres chers. Rendu-là, il comprit que sa voie n’était pas d’être sur la mer, mais bien sur la terre. À l’aide de Frank et de son cadet, Albert, il se reforma charpentier de bateau. Après tout, ne connaissait-il pas la matière ? Combien de fois avait-il étudié le squelette d’un de ces moyens de transport ? Cent…deux cents fois ? Les premières années furent plutôt léthargiques puisqu’il n’y avait qu’une ou deux commandes par mois et Charles sentait le désespoir le gagner. Qu’adviendrait-il s’il n’était plus capable de payer les taxes ? Sa famille se retrouverait de nouveau sans toit. Il ne pouvait s’imaginer capable de supporter une nouvelle fois la tristesse et la déception dans les yeux de sa femme.

Heureusement, au bout d’une demi-décennie, il réussit tranquillement à se faire un nom. Les gens venaient de plus en plus souvent le voir. Les nouvelles générations voulaient de nouvelles embarcations plus rapides, plus solide. Du renouveau. Ses années les plus fructueuses et les plus malheureuses furent sans doute les années de guerre. Les charpentiers étaient quémandés par dizaine pour aider à la fabrication de vaisseaux de guerre. Des vaisseaux de la mort…Malgré son fort accent et l’habitude du peuple à le surnommer « l’Anglais », Charles monta en affaires et pu même agrandir sa demeure plus d’une fois. Il s’épanouissait dès qu’il surprenait le rire de sa femme…ce doux son cristallin qu’il n’avait pas entendu depuis la naissance de leur cadet. Mais cette existence de pauvreté était loin derrière et il goûtait enfin à la vie.

À force de persévérer, Charles fut nommé dirigeant de plusieurs charpenteries, le contremaître en quelque sorte. Un tel regroupement étonna beaucoup de gens. Des charpentiers qui se réunissent sous une même entreprise ? Où en était l’économie ? Enfaîte, celle-ci allait de mieux en mieux pour Charles qui voyait sa « compagnie » s’enrichir. Ces hommes avaient confiance en lui et il avait confiance en eux. Mais il craignait ses vieux jours qui approchaient à pas de loup, lui qui n’était qu’un pauvre agneau à la proie du temps. N’était-ce pas deux nouvelles rides qui apparaissaient au coin de ses lèvres ? Et ces pattes d’oie, étaient-elles là hier ? Il lui fallait agir, choisir l’héritier de son entreprise. Normalement, il aurait eu préférence pour l’aîné, mais Frank n’était pas le genre d’hommes que Charles aimerait avoir à sa place. Ô bien sûr, il était rempli de bonne volonté, mais aussi de mauvaise. Pas trop habile de ses mains, il était du genre à diriger sans avoir l’expérience du travail ; de critiquer sans connaître le fondement de la chose. Saurait-il prendre de bonnes décisions, celles propices à long-terme ? En contrepartie, il y avait Albert. Sans conteste doué pour les travaux manuels, cependant cela le laissait de marbre. Il avait pris goût, lorsqu’il était tout jeune, au soleil se couchant sur l’horizon délimité par un océan bleuté et scintillant. Il adorait l’odeur de la mer et d’un vieux pont de bois récuré à l’aide de savon de suif. Voyager, c’était sa passion et son père savait qu’il serait bien malheureux à besogner dans la maçonnerie. Mais on ne peut pas toujours décider de sa voie. On ne peut pas toujours espérer réaliser nos plus grands rêves et ne pas saisir l’occasion qui se présente à nous même si elle ne nous satisfait pas. Un jour, Charles réuni ses deux fils dans le salon de la demeure. D’un ton ferme, il leur exposa son plan d’avenir :


« Mes chers fils, chaque matin, je sens mes os criés un peu plus de douleur sous le poids des minutes écoulées. Je crois que c’est le temps de me choisir un digne successeur, un homme capable de me remplacer avec brio. »

« Père, intervint Frank, je suis votre aîné, donc votre fils choisi dès sa naissance pour vous remplacer. »

Albert suivait vaguement la conversation, connaissant le sort qu’on réservait habituellement aux infortunés cadets.

« Et bien mon fils, aujourd’hui, les Wickford ne suivront pas les coutumes. Ton frère et toi, travaillerez sous la direction de mes deux meilleurs hommes. À la fin du mois, ce sont eux qui choisiront le vainqueur selon ses aptitudes. »

« Mais, répliqua Frank d’une voix désespérée, vous savez aussi bien que moi qu’Albert est le meilleur de nous deux pour les travaux manuels. C’est injuste dès le départ. »

« Non mon fils. Mes hommes ne jugeront pas seulement le travail accompli de vos mains. Ils noteront aussi votre façon de prendre des décisions, votre esprit de groupe et votre talent de parleur. Nous ne pourrions avoir quelqu’un qui ne sait discuter avec les clients. »

L’aîné toujours aussi offusqué de voir son héritage mis en doute, répliqua : « C’est assez père ! Je vois clair dans votre jeu. Tout est déjà décidé. Depuis que nous sommes jeunes, je ressens votre préférence pour mon cadet. Tout cela n’est que machination pour me voler ce qui me revient de droit ! »

Charles soupira. Son aîné était plus têtu que la pire des mules. Heureusement, Albert prit sa défense.

« Allons bon Frank, ne vois-tu pas que cette crise est superflue. Tu sais bien que père est un homme plus qu’honnête. Penses-tu vraiment que nous jouerions lui et moi à la déloyal ? Si cela est la volonté de père, je respecterai ses choix. »

Frank grommela dans sa barbe et prépara une réplique quand le regard accusateur de son père lui fit prudemment baisser la tête. Il ne tenait pas à perdre son héritage avant même d’avoir pu concourir pour l’obtenir.

« Alors qui en soit ainsi. Je vous laisse jusqu’à la fin du mois pour faire valoir vos talents. »

Le père congédia ses deux fils d’un signe de la main. L’obstination de Frank et l’impassibilité d’Albert l’épuisait. De plus, l’enjeu du pari lui faisait croire qu’il avait peut-être commis une erreur. Ne venait-il pas de liguer deux frères l’un contre l’autre ? Seulement, il y avait des moments pour la sagesse et d’autres pour l’action. En ce moment, la dernière option semblait la meilleure et la plus attirante aux yeux de Monsieur Wickford.

Les deux fils Wickford furent ainsi en compétition jusqu’à la fin du mois. Possédant deux points de vue très divergeant, ils ne travaillèrent pas du tout de la même manière. Frank angoissé à l’idée que son frère puisse hériter passait des nuits blanches à essayer de faire disparaître sa nervosité. Le jour, il donnait le meilleur de lui-même, croyait-il, en faisant toujours plus que demander, mais il finissait constamment par se mêler à des choses qui ne le regardaient nullement. Cela mit sur les nerfs bon nombre de charpentiers œuvrant sur le même chantier. Albert, quant à lui, voyait ça d’un autre œil puisque depuis son tout jeune âge, il s’était habitué à passer deuxième en presque toutes circonstances. À quoi bon donner plus que d’habitude ? Une fois le délai passé, il reprendrait sa vigueur habituelle et pourrait décevoir ceux qui en attendaient plus de lui. Autant que les autres hommes s’habituent à son rythme. Comme vous l’avez sûrement deviné, les hommes chargés dévaluer les deux frères préférèrent nettement le cadet que l’aîné. Malheureusement, Frank s’en doutait bien et ne put contenir l’immense jalousie qui grandissait en lui. Un incident se préparait, un incident qui marquerait la famille à tout jamais…

Un soir, Albert se rendit à l’établi de la maison pour y sculpter la maquette du bateau de ses rêves. Au bout de quelques minutes de labeur, il entendit des bruits de pas derrière-lui. Se retournant, il aperçut son frère, une torche à la main, qui le fixait avec fureur. Albert le salua d’un mouvement de tête et se remit à l’ouvrage. Il n’était guère d’humeur à affronter les caprices de son frère surtout lorsque celui-ci exploitait son côté de teigne. Frank tapa du pied autant pour exprimer sa colère que pour attirer l’attention de son cher frère. Crachant ses paroles comme du venin, il cria :


« Comme oses-tu me voler ce qui me revient de droit ? Tu n’es qu’un traître…tu…tu ne mérites même pas d’être de mon sang ! »

« Qui es-tu mon frère pour m’hurler de telles calamités. Reviens me voir lorsque tu sauras agir et parler avec indulgence et intelligence. »

« Dans ton cas, ce n’est pas de l’intelligence, c’est de la fourberie ! Tu as ligué notre père contre moi et sans aucun remord à ce que je vois. »

« Je ne peux pas avoir de remord pour ce que je n’ai pas fait. »

À ces mots, Albert se détourna à nouveau de son frère. Celui-ci vue rouge d’être ainsi ignoré et se jeta sur son frère, oubliant la lampe qu’il tenait à la main. Celle-ci roula beaucoup plus loin dans l’établie. Albert évita les coups de son aîné, mais dut bien vite se résoudre à les retourner pour éviter le pire. Albert était plus costaud que Frank et parvint très vite à le maîtriser. Prenant son modèle réduit de navire dans une main et soutenant son frère de l’autre, il rentra dans la maison accueilli par les appels de sa mère épouvantée. Comment les deux fruits de sa chair pouvaient-ils se battre ainsi ? D’un pas ferme, elle se rendit dans le bureau de son mari où celui-ci écrivait tranquillement ses comptes. Il s’ensuivit une discussion mouvementée où Madame Wickford accusait son mari de tous les tords causés à leurs deux fils. Son idée de concours était stupide et insensée disait-elle. À cause de lui, elle n’avait droit qu’à des querelles à l’intérieur de sa demeure. Charles, déconfit, s’en alla faire un tour dans l’établi où il pourrait enfin avoir la paix. Seulement, la lampe de Frank s’était brisé au contact du sol, un peu plus tôt et le vieux bois qui y traînait n’avait pas encore pris feu, mais commençait lentement à tisonner. Charles, insouciant du danger, rabattait ses mauvais esprits sur le travail de ses mains. L’odeur de fumée ne le mit pas immédiatement en alerte, mais la chaleur qui montait le mit en garde…trop tard. L’établie prit feu avec le pauvre homme à l’intérieur. Une poutre s’affaissa devant la porte entraînant Charles qui se retrouva coincé. Dans un dernier espoir, il pria que ses fils s’en rendent compte, mais ceux-ci cuvaient leur haine mutuelle enfermés dans leur chambre respective. C’est madame Wickford qui aperçut les flammes la première et toute la maison fut rapidement alertée. Cependant, ils arrivèrent trop tard et Charles Wickford immigré d’Angleterre mourut dans les flammes provoquées par la lutte de ses fils.

Frank, plus sournois qu’un renard, saisit l’occasion. Leur père n’avait pas encore modifié le testament, attendant un gagnant, donc tout lui revenait de plein droit. Décidant de faire une pierre, deux coups, il raconta à tout le monde que la lampe retrouvé sur le lieu de l’incident était celle de son frère. Effectivement, cela était vrai puisque Frank lui avait emprunté. Celui-ci eut beau démentir les ragots se propagèrent dans toute la ville. Frank dit à sa mère qu’il ne pouvait plus vivre où son père était mort et il acheta une maison dix fois plus sophistiqués et grandes un peu plus au Nord avec l’argent de son héritage. De toute façon, il en ferait bientôt plein d’autre. Dans un élan de compassion l’aîné laissa une ridicule somme à son frère et la maison familiale. Ensuite, il disparut de la vie de ce dernier, emmenant leur mère atterrée et en deuil avec lui.

Ainsi, Albert se retrouva seul contre la vie. Malgré ces évènements cruels, il ne se laissa pas abattre. Oui, son père était mort, mais il ne l’avait jamais entraîné à être une loque. Avec l’argent offert par son mesquin de frère, Albert fit construire le bateau qu’il avait commencé à sculpté cette fameuse nuit-là. Maintenant que son frère était à la tête de l’ancienne entreprise de son père, Albert devait trouver un autre emploi et il savait ce qu’il voulait faire. Il allait devenir capitaine de son propre navire et voyager sur toutes les mers. Mais il devait trouver quelqu’un pour s’occuper de sa maison en son absence. Il n’était pas marié et en n’en ressentait pas l’envie. Faisant le tour des domestiques que son frère avait injustement renvoyé, il trouva une vieille femme en pleurs. Celle-ci avait une fille de presque trente ans et elle devait travailler pour les faire vivre toutes les deux. Albert engagea la demoiselle de bon cœur. C’est ainsi qu’il rencontra Nanie. Celle qui serait sa seule amie. Le capitaine Albert, aussi appelé « capitaine Bébert », voyagea pendant de très longues années. Presque une décennie enfaîte. Il ne revit son frère qu’une fois, lors de l’enterrement de leur mère et ce fut bien assez. Frank se plaisait à démontrer à quel point il était prospère aux yeux de tous. De quoi énerver grandement le cadet.

Au bout de presque dix ans, Albert décida de lui aussi se lancer en affaire. Il fonda la compagnie « Les transports maritimes du lys ». Qu’est-ce que c’était ? Une organisation qui rassemblait les bateaux servant au commerce. Il envoya ainsi ses embarcations dans près de tout l’Europe pour y présenter de la marchandise faisant fie des menaces de guerre. Les commerçants le connaissant bien n’hésitaient pas à faire appel à lui pour transporter leurs produits. Albert accompagnait souvent les livraisons même s’il pouvait à présent tout gérer de son petit chez-soi. C’est qu’il ne voulait pas oublier le cri des goélands ou la clameur d’un équipage. La mer était son royaume et ses marins, ses sujets. Un jour, on lui demanda de livrer une importante quantité de victuaille pour une soirée mondaine. Rendu là-bas, on le pressa de venir partager quelques-unes de ses aventures avec les invités. Ceux-ci poussaient des Oh! Et des Ah! Tandis qu’il leur racontait des histoires de pirates et de tempêtes effroyables. Pourtant, le regard du loup de mer était attiré par une seule des convives. Une splendide femme qui lui faisait les yeux doux. Ses traits avaient quelque chose de bestial qui charmait le capitaine. Après avoir parler jusqu’à temps que sa gorge soit plus aride qu’un désert, il rejoignit la dame, deux verres à la main. Celle-ci se mit à rire, un rire qui rappela au capitaine celui de sa mère. Décidemment, cette femme était une perle rare. Albert conversa avec elle toute la soirée et finit bien évidemment dans ses bras lorsque la nuit eut étendue ses charmes. Le capitaine se réveilla au matin avec une étrange marque sur l’épaule. On aurait dit…une morsure ? Devant lui, celle qui se faisait appelé mademoiselle Rose, souriait de toutes ses dents étonnamment blanches. C’est là qu’elle sema la confusion dans l’esprit du pauvre Wickford. Venait-elle de lui dire qu’elle était une lycan ? Une créature du diable ? Qu’elle l’avait mordu, car elle l’avait choisi pour être son pantin ? Mais qu’avait-elle pris pour lui dire de telles sottises ? Cela faisait à peine vingt-quatre qu’ils se connaissaient. Au bout de quelques jours, le capitaine dut bien-vite de faire à l’idée de ce qu’il était devenu. À si son frère le voyait, il n’hésiterait pas à le tuer et Albert l’encouragerait à le faire. Une bête rejetée de Dieu, un meurtrier et un monstre assoiffé de sang ne méritait pas de vivre. Si seulement, il avait le courage de s’ôter lui-même la vie… Au bout de trois semaines à vivre au crochet de Rose, il revint avec elle dans sa demeure près du port. Qu’elle ne fut pas la surprise de Nanie de voir son maître revenir avec une femme ! Albert raconta qu’il s’était marié sur un coup de tête et ramenait l’élue de son cœur dans sa nouvelle demeure. Ce qui était absolument faux. Rose ne faisait que se servir de lui pour avoir le gîte et la pitance. Le pauvre Albert ne pouvait aucunement contester. Elle était sa créatrice, sa maîtresse. Était-il au bout de ses peines ?

Un évènement inattendu vint ébranler la routine de Rose, du capitaine et de Nanie. Un soir, Rose annonça de but en blanc qu’elle était enceinte. Albert fut démoralisé. Quel genre de monstre pouvait bien grandir dans le ventre de sa créatrice ? La fausse madame Wickford ne semblait pas plus ravie et même furieuse. Qu’allait-elle faire d’un enfant ? Et sa liberté dans tout ça ? Cela faisait presqu’un an déjà qu’elle vivait entre ses murs. Un record oui ! Que ferait-elle d’un enfant ? D’un de ces petits êtres baveux et collants qui transformait votre vie en enfer ? Déjà que la sienne ressemblait bien peu au paradis. Non, elle ne voulait guère d’un rejeton dans ses jupes. Le lendemain, elle coinça le capitaine dans son bureau et lui exposa d’un ton neutre :


« Dès que l’enfant est au monde, je te quitte et je te laisse le fruit de tes erreurs. »

« Mes erreurs ? Ce sont plutôt les tiennes ! Tu m’as pris mon humanité et en échange tu me laisses NOTRE enfant ! »

« Il ne te sert à rien de discuter puisque tu es obligé d’obéir. En plus, si tu ne prends pas l’enfant, je le laisse à l’orphelinat. Je gage qu’ils n’hésiteront pas à le tuer dès qu’ils découvriront ce qu’il ait. »

« Tu es une monstrueuse femme. Tu sais très bien que je ne pourrais consentir à un tel acte. Tu avais tout prévu. Tu savais que je garderais l’enfant si cela l’épargnait. »

« Ô, je ne suis pas plus monstrueuse que toi. Tu verras avec les années, les gens changent… »

Sur cela, elle tourna les talons et quitta la pièce en un glissement de robe. Albert se prit la tête et jura sur tous les saints qu’il connaissait. Quand le malheur lui laisserait-il le temps de respirer ? Les mois s’écoulèrent et les deux futurs parents s’évitaient. Albert se doutait bien que Rose invitait plusieurs amants en son absence et faisait tout en son pouvoir pour rester éloigner de la maison. La perspective d’être en présence de cette affreuse femme plus d’une demi-journée lui donnait de l’urticaire. Nanie regardait avec tristesse Albert se replier sur lui-même et faire un doigt d’honneur à la vie. Enfin, la délivrance arriva pour Rose et le moment fatidique pour le capitaine. Mary Ann Roselyne Wickford vue le jour. Albert qui s’attendait à une erreur de la nature fut étonné d’apprendre qu’il avait une petite fille. Il la trouva même…mignonne. Mary était le prénom de sa mère, il l’avait choisi en son honneur. Nanie avait compléter par Ann pour faire diversifier. Le Roselyne ? C’était une idée de Rose. Enfaîte, c’était son véritable prénom et elle tenait à ce qu’Albert ne l’oublie pas. La même journée, elle quitta la maison au grand soulagement d’Albert. Maintenant, il devait cohabiter avec sa fille. On déclara madame Wickford morte en couches et personne ne s’inquiéta de son absence. C’était courant ces choses-là.

Ainsi, Mary Ann grandit avec son père et Nanie ou plutôt SA Nanie. Devenue une mère de remplacement, Mary Ann la suivait partout, ce qui amusait grandement les deux adultes. Contre toute attente, Albert adorait sa fille. C’était son trésor, son plus grand exploit. Les mauvais souvenirs ne lui collaient pas à la peau. Il avait été capable de différencier la mère et la fille et il aimait cette dernière. Mary avait des yeux doux et des traits angéliques. Rose ne possédait qu’un visage animal et des manières manipulatrices et cruelles. De plus, si Rose aimait faire souffrir et mener par le bout du nez ce pauvre homme, Mary, quant à elle, vouait une grande admiration pour son paternel. Elle le croyait invincible et immortel. Pour lui faire plaisir, Albert l’amenait presque partout avec lui. De lui, elle avait hérité de ce goût pour le doux parfum de l’eau salée et le chant des vagues qui s’écrasent sur un navire. Aussi, elle avait le pied marin, cette aisance à marcher d’un pied ferme sur la coque malgré la danse des eaux. Le roi des mers possédait maintenant une petite princesse, une sirène. Il n’y avait qu’une chose qu’Albert était incapable de partager avec sa fille : La peur de ce qu’ils étaient. Une discussion reste gravée dans cette histoire. Celle d’un père qui met en garde sa fillette contre les dangers de la vie, c'est-à-dire eux.


« Viens ici, ma petite étoile de mer. »

Mary Ann grimpa sur les genoux de son paternel.

« Oui père ? »

« Sais-tu ce que tu aies ? »

« Un lycan, dit fièrement la jeune fille. »

« Oui…un lycan, mais ça ma fille c’est un secret entre toi et moi. Personne ne doit le savoir, tu as compris ? »

« Oui père…mais même pas Nanie ? »

« Je crois bien que Nanie se doute de beaucoup de choses, mais non, même pas Nanie. Tu vois, nous sommes différents et les humains, ils n’aiment pas les gens différents. Ils leur font des choses très méchantes. »

« Nous aussi, on leur fait des choses très méchantes. »

« Oui, mais nous sommes obligés. C’est dans notre nature. Et puis, nous ne sommes pas les seuls. N’oublie jamais ma petite qu’il existe des êtres aussi ou sinon plus vils que tous les autres. Ils sont prêts à te voler ta vie pour un oui ou pour un non. »

« Vous parlez des vampires, n’est-ce pas ? »

« Oui, ma chérie. Ceux-là tu ne dois jamais t’en approcher. Nos deux espèces sont en guerre depuis bien longtemps et ils n’hésiteront pas avant de te faire du mal même si tu es la plus jolie créature sur terre. »

« Moi, j’aimerais bien en rencontrer un. Je me demande si leurs crocs sont aussi pointus que les notre. Les miens, ils me font peur parfois… »

La petite fille baisse la tête et regagne sa chambre en courant sous le regard désolé de son père. Il sacrifierait sa vie sans pour que sa fille soit humaine. Il déteste le destin incertain qu’il lui offre. Avant qu’elle ferme les yeux et rejoigne le pays des rêves, le capitaine vint la border une dernière fois.

« Demain, je pars à l’aube porter des armes à l’armée de France. »

« Des armes ? Pourquoi père ? »

« Et bien, l’humanité a toujours eu besoin d’armes pour se sentir en sécurité. »

« Si vous partez, chantez-moi ma berceuse une dernière fois. »

« Tu auras tout ce que tu voudras ma princesse. »

Et la voix claire du capitaine peu à peu mêlée à celle de sa fille résonne jusqu’aux limites de la propriété.

Demain, aux aurores
Je partirai vers le nord
C’est ta voix qui me portera
C’est ton souffle qui me réchauffera
C’est tes pas qui me guideront
C’est tes yeux qui m’éblouiront
Soit mon soleil
Soit ma merveille
À la fin de l’année
Rejoins-moi au bout du quai
Et apporte-moi un bouquet de lauriers
Si jamais, je ne reviens pas…
Chante pour moi
Les oiseaux m’apporteront ta voix…

C’est là qu’une voix remplie de douceur enfantine surgit de la pénombre. « Vous reviendrez père ? » Il s’en suivit un regard de fierté paternel. « Je te le promets » Ainsi, la petite fille s’endort, rêvant des aventures que vivra son cher père. Celui-ci quitte sans bruit la chambre pour se préparer à l’appel du voyage. Il est confiant. Même si Dieu l’a sans doute renié, jamais Il ne pourrait abandonner l’innocente petite fleur qu’est sa Mary Ann. Alors, il part sans crainte et assuré de son retour.

Bien des années se sont écoulées et Mary Ann a atteint l’âge de dix-huit ans. Son père lui a tout raconté. La trahison de son frère, sa vie de capitaine solitaire, la rencontre avec sa mère et sa naissance. Elle affronte bien son passée et n’a aucune difficulté avec le présent. Cependant, une triste nouvelle l’attend au port où elle devait rejoindre son père. Son bateau ainsi que tous ses occupants ont disparu sur le chemin du retour. Ils auraient disparu dans une tempête d’une rare intensité. Mary Ann le savait, son père était trop vieux pour entreprendre une telle traversée. Pourquoi ne l’avait-il pas écouté ? Elle lui avait bien dit qu’à son âge, les hommes se reposent de leurs actes. Il n’avait rien voulu entendre, jurant que ça serait la dernière fois qu’il ferait pareille aventure. Malheureusement, ses paroles s’étaient retournées contre lui. Mary Ann l’imaginait bien suffocant et crachant l’eau qui lui emplissait les poumons tandis qu’il se noyait. Des larmes coulaient abondamment sur ses joues pendant qu’elle courrait jusqu’au quai, la gorge en feu et la jupe virevoltant dans tous les sens. Sa voix cassée par la peine s’élevait pardessus les cris des gens travaillant au port et le bruit des goélands à la recherche de nourriture.

« Si jamais, je ne reviens pas
Chante pour moi
Les oiseaux m’apporteront ta voix… »

Longtemps, elle restera étendue sur les vielles planches en bois, se remémorant toutes les fois où elle y avait accueilli son père triomphant de la bête qu’est la mer. Pourquoi ne revenait-il pas encore ? C’est Nanie qui la trouva lorsque la nuit fut tombée et qui la traîna jusque chez-elle. Tout allait changer à présent. Albert ne s’était jamais marié, donc il n’avait pas autre héritier que sa fille. Elle devait maintenant prendre les raines de l’entreprise de son père ; diriger les allées et venues d’une vingtaine de bateau de marchandises. De plus, elle devait aussi entretenir les comptes de la propriété sans cesse grandissante et veiller à ce que la maison familiale, qui ressemblait plus, à présent, à un manoir qu’à une simple maison, reste en bonne état. Une fois que les autorités eurent déclaré son père décédé, elle convoqua tous les employés de son défunt père.

« Aujourd’hui, je vous convoque tous pour vous annoncer que je ne vends pas l’entreprise. J’ai décidé de reprendre le poste de mon père. »

Des murmures négatifs fusèrent de partout. Mais c’était une femme ! Une jeune femme sans expérience de plus. Un vieux matelot plus courageux que les autres prit la parole :

« Mais vous êtes une femme mam’zelle Marie-Anne. Une p’tite femme, ça dirige pas. Ça aide son mari. »

La fameuse « mam’zelle grimaça. D’un parce qu’elle pouvait très bien diriger cette compagnie même si elle était du sexe faible et de deux, parce que cet homme avait écorché son nom avec son accent français. Ceux-ci prononçaient Marie-Anne alors qu’il fallait le dire d’un ton anglais, Mary Ann. D’un ton autoritaire, elle répliqua :

« Je ne peux peut-être pas charrier ou injurier comme un homme, mais il reste que j’ai de l’expérience. Je sais comment mon père fonctionnait et je suis certainement capable de faire de même. Je ne me souviens pas de vous avoir déjà entendu critiquer cette façon de faire, donc il n’y a aucun problème de ce côté-là. De plus, je n’ai pas de mari et si j’en avais un, c’est lui qui m’aiderait. »

« Comment vous allez faire pour mener des commandes ? répliqua le vieux marin. Vous êtes pas capitaine et vous le serez jamais. Une femme sur un bateau, c’est pire qu’un chat noir. Ça porte la poisse et même le Seigneur y’aime pas ça. »

Mary Ann sentit son sang bouillir, mais retint ses paroles non harmonieuses. Tout ce qu’elle demandait, c’est qu’on lui laisse sa chance ! Heureusement, un jeune mousse vint prendre sa défense.

« Allons le vieux, laisse tomber la vielle école. C’est une dame maintenant la fille du capitane Bébert. Il faut lui faire confiance. C’est mieux que de se retrouver sous les ordres d’un de ces petits hommes gras qui ne font que geindre de la puanteur du poisson. »

Plusieurs personnes hochèrent la tête pour partager leur accord et la fille du capitaine sentit son espoir renaître. Oui, c’est ainsi qu’on allait l’appeler pendant longtemps : « La fille du Capitaine ». Elle gagna le respect des marins de presque de la totalité des voix. Deux ou trois matelots, habitués à ce que les femmes ne prennent guère de décisions, ne votèrent pas en sa faveur. Mary Ann prit la tête sans aucun inconvénient pendant les trois premiers mois. À l’aube du quatrième, elle eut une visite très désagréable d’un parent qu’elle aurait préféré mort à la place de son père. Son cher oncle Frank. Elle ne l’avait jamais rencontré auparavant, mais la description de son père lui avait suffi. Un être vil, ignoble et prêt à tout pour parvenir à ses fins, voilà ce qu’était son oncle ! Pourtant, elle le reçut avec amabilité et honneurs. Enfin, pour les premières heures…Au souper, il lui fit une déclaration qui la laissa pantoise.

« Ma chère nièce, je sais que tout ce que vous a laissé votre père doit être très lourd à porter. Je suis venu vous voir pour vous proposer de prendre votre place au sein de l’entreprise d’exportations et d’importations par voies maritimes. Bien sûr, vous pourriez demeurer ici avec votre gouvernante…Tatie ? »

« Nanie ! Corrigea promptement Mary Ann pour le faire taire. Je ne vois pas du tout pourquoi je vous laisserais ma place. C’est mon héritage et vous ne me le volerez pas comme celui que vous avez volé à mon père ! »

« Volé à votre père ? Hum…nous détenons deux différentes versions ma très chère. Je n’ai fait que récupérer ce qui m’appartenait. C’était votre père le voleur. »

« Comment osez-vous traiter mon père de voleur ?! Vous profanez son nom, alors qu’il est mort ! Vous n’êtes qu’un vilain personnage imbu de lui-même. »

« Calmez-vous ma petite. Je ne voulais pas vous offusquer ni prétendre vous prendre votre héritage. J’ai une solution qui vous conviendrait sûrement… »

« Une solution à quel problème ? Le coupa-t-elle. La seule chose qui m’indispose, c’est votre présence. »

« Une solution au fait que vous n’êtes qu’une bâtarde. Oh non, ne me regardez pas ainsi. Je sais que votre père vous l’a dit. Comment aie-je deviné ? Et bien, je n’ai trouvé aucun certificat ou signature prouvant le mariage de vos parents dans l’église où ils se seraient supposément unis. Vous n’êtes donc que le fruit d’une aventure ma chère et cela, les gens n’aiment pas ça. »

« Les gens n’aiment pas grand chose en ce monde. Votre audace me laisse de marbre. Salir le nom de mon père, de ma mère et le mien est un acte démesuré si on compte le fait que vous n’aviez pas revu mon père, avant sa mort, depuis des années. Je vous prierai de quitter mon manoir dans les plus brefs délais et je ne tiendrai pas compte de ces paroles hasardeuses. »

« Attendez au moins d’avoir entendu ma proposition. Je voudrais vous épouser comme cela tout serait à vous autant qu’à moi et je pourrais vous aider. Je ne veux que votre bien ma chère. »

« Cette fois-ci, vous dépassez les limites de mon bon-vouloir ! Vous épousez ? Vous avez presque trois fois mon âge et vous avez accusé mon père d’un meurtre accidentel que vous aviez commis ! Pensez-vous que je ne saisis pas vos menaces voilées ? Si je ne vous épouse pas, vous raconterez à tout le monde que je suis une bâtarde ? Et bien faîte-le donc ! Nous allons voir qui les gens vont croire. Vous, un être cupide et malsain, ou la mémoire de mon défunt père qui valait cent fois mieux que vous et que tout le monde respectait. »

« Je vous jure ma petite, dit Frank avec un regard furibond, que vous regretterez ces paroles. Je ne suis loin d’avoir un pied dans ma tombe. »

« Sortez d’ici tout de suite mon oncle et si jamais vous osez revenir, je vous colle un procès pour violation de propriété. Croyez-moi, j’ai bien des amis à la cour. »

Rabattant son manteau de velours contre lui dans un faux élan hautain, Frank quitta avec dédain la pièce pour rejoindre son côcher. Il n’en avait pas fini avec sa nièce. Elle verra bien qui est le plus malin des deux. Mary Ann soupira de soulagement. Elle venait de se jeter dans la gueule du loup et de faire un grand pas dans la cour des grands. Mais était-ce son oncle le loup ou bien…elle ? Une chose était sûre, elle ne lui accorderait jamais sa main. Plutôt mourir ou perdre ses possessions, mais avant ça, elle allait se battre. Nanie vint la rejoindre et posa une main sur son bras. L’oncle reviendrait sans aucun doute. Quelques jours plus tard, la jeune femme apprit que le frère de son père avait perdu presque toute sa fortune à cause de quelques mauvaises décisions et que ses hommes se rebellaient de plus en plus contre son autorité. Pour maintenir sa vie coûteuse, Frank se serait même lié à des affaires plutôt louches dans le bas-monde. Même qu’une rumeur comme quoi il serait un opiomane parvint à sa nièce. Décidément, rien n’était rose chez cet homme…

Quatre ans se sont consumés. Mary Ann a vingt-deux ans et dirige toujours l’entreprise. Son oncle revient assidument refaire sa proposition et à chaque fois, elle refuse. Étonnamment, Frank n’a toujours rien dévoilé au peuple. C’est qu’il a peur de commencer cette lutte avec sa nièce. N’y a-t-il pas une tout petite chance pour que ça soit elle qui remporte la partie ? Il doit tout calculé et tout préparé avant d’agir. De plus en plus, il reste dans ses parages. Il va aux mêmes évènements, aux mêmes bals. Il la surveille de près, mais il est très loin de savoir qui elle est réellement…Nanie s’en doute, Mary Ann a bien des épreuves encore à traverser. Elle, la fille du capitaine, mademoiselle Mary Ann Wickford la bâtarde…Elle mène sa vie comme elle mènerait une barque, bravant ceux qui lui tiendraient tête. Travaillant telle une forcenée, voulant prouver qu’elle est la digne fille de son père et qu’elle sait diriger et s’affirmer…Autant dans le monde du commerce que dans celui de la nuit. Réciproquement de son père, Mary Ann n’appréhende pas l’obscurité et ce qui s’y dissimule. Elle est en paix avec ses origines, ne voyant pas sa condition de Lycan comme une malédiction, mais plutôt comme une sorte de race à part. Parfois, la sombre noirceur de l’heure des morts résulte à de biens drôles de choses. De temps à autres, la jeune femme songe à un certain matin où elle a découvert un cadavre assez dérangeant…


« Mademoiselle Wickford! Mademoiselle Wickford! C’est affreux...C’est scandaleux ! »

« Mais de quoi parlez-vous ma bonne Nanie ? Le garçon d’écurie, que j’ai engagé, a encore laissé ses bottes encrassées sur votre plancher fraîchement ciré ? »

« S’il ne s’agissait que de cela, s’exclama la gouvernante, j’embrasserais ce vaurien. Je parle d’un meurtre mademoiselle Wickford ! D’un véritable meurtre ! Et commis près de vos docks ! Mais où va le monde me direz-vous ! Si seulement je le savais ! »

« Calmez-vous ma chère Nanie. À ce rythme-là, les autorités vont se retrouver avec deux dépouilles sur les bras. J’aimerais savoir, qui est le décédé ? »

« Un de vos employés à ce que m’a raconté la fille de cuisine qui a une sœur qui a une cousine qui a un frère…enfin y’a un lien avec la nouvelle veuve Morrison. »
« Le vieux pêcheur Morrison ? »
« Non, son fils ou son petit-fils. M’enfin, ils s’appellent tous pareils dans ces familles-là. »

« Hum…je pense que je vais me rendre au port pour éclaircir la situation. »

« Comme vous voudrez mademoiselle. Je fais venir votre coche dès que je mets la main sur ce sacripant de garçon d’écurie. À la place de sa mère, je lui aurais donné une de ces fessés depuis longtemps déjà ! »

Nanie quitta la pièce aussi vite que son âge lui permettait, laissant une Mary Ann bien songeuse. Un mort, ce n’est jamais bon signe pour le marché avec tous ces marins superstitieux. Elle noua ses cheveux en un chignon serré sous un fichu de coton, enfila ses gants fins et descendit rejoindre son « carrosse ». Son petit doigt lui soufflait qu’il avait anguille sous roche et elle était bien décidée à comprendre pourquoi. Rendu sur le lieu du crime, elle retrouva la veuve Morrison deuxième du nom, pleurant à chaudes larmes entre une troupe de commères au repérage. Mary détestait ces vielles mégères qui agissaient comme un chien à qui on agite un morceau de viande bien juteuse sous le nez. Elles étaient pire que des pies celles-là. On s’écarta vivement pour laisser passer la fille du capitaine qui offrit ses plus sincères condoléances à la femme esseulée. En guise de présent de deuil, la jeune femme céda un des ses plus beaux mouchoirs brodés à l’endeuillée, puis elle se rendit à l’endroit où le corps se trouvait toujours. Personne n’avait osé déplacer le fils Morrison sans l’accord des autorités ou de la veuve. Les premiers restaient perplexes face aux circonstances de la mort et cette dernière n’était guère apte à prendre une décision aussi futile soit-elle. Soulevant ses lourdes jupes qu’elle jugeait particulièrement inutiles, mais qu’elle n’osait prescrire à sa garde-robe pour cause qu’une femme bien élevée ne tenterait un tel affront, Mary Ann se pencha vers la dépouille. Ce qu’elle vit la déplut fortement et elle fronça le nez de dégoût. L’homme devait être mort depuis douze heures au maximum et six heures au minimum. La jeune femme ne possédait pas l’expérience pour lancer une réelle supposition. Le torse jusqu’à la moitié du cou semblait avoir été lacéré par une lame…ou des griffes. Cette pensée arracha un frisson à la demoiselle. Elle se croyait seule de sa race dans les environs pourtant ces marques…Mais comment un lycan aurait pu être aussi négligeant ? Elle pressa un linge contre sa bouche, la puanteur lui donnait la nausée et lui piquait les yeux.

« Ah ! Mademoiselle Mary Ann Wickford, dit une mystérieuse personne derrière-elle, je vous attendais. »

Mary se retourna avec sursaut et découvrit un des plus vétérans marins à sa solde, Harry le vieux loup de mer.

« Bonjour Harry. Quelle triste nouvelle, n’est-ce pas ? »

« On m’a dit que le fils Morrison aurait eu un déplorable accident. On ne m’avait pas menti. »

« En effet, je me demande bien quel genre de bête ou d’homme pourrait perpétuer un tel acte et laisser sans remord sa victime pourrir à la vue de tous ? »

« Une sale bête, mademoiselle…une sale bête, mais ne vous semblez pas trop surprise et terrifiée par ce cadavre déchiqueté. »

« J’en ai vue d’autres dans ma vie mon cher Harry, bien d’autres… »

« Donc, je suppose que vous savez de quelle bête, je parle ? »

« … »

Mary Ann adressa un regard ahuri à l’homme. Quel genre de sous-entendus voulait-il lui glisser à l’oreille ? Harry retroussa ses manches usées par le soleil, le sable et l’eau de mer. Une odeur de sang de poisson vint chatouiller les narines de la jeune femme, mais elle n’y prêta pas attention, son regard étant fixé sur l’avant bras du marin. Sous le lourd bronzage, on pouvait discerner un tatouage de forme lupine et en son centre…une morsure ? Et oui, il s’agissait bien des traces d’une très ancienne marque de dents blanchie avec le temps. Mary releva les yeux vers le visage de l’homme avec un air interrogateur. Celui-ci lui répondit d’un signe affirmatif de la tête.

« J’ai tué celui qui m’a fait ça, il y a bien longtemps. Ce monstre avait tué ma femme et mes deux filles sous mes yeux avant de me transformer en ce que je suis aujourd’hui, seulement pour me rappeler que je n’avais pu les défendre…Mais tout ceci est loin derrière-moi à présent. Pour l’instant, je peux vous jurer que l’assassin n’était pas un loup-garou.»

« Comment pouvez-vous affirmer une telle chose ? »

Mary Ann se rendit compte trop tard qu’elle venait de se trahir. Si le marin se doutait quelque peu de sa condition, il en était certain maintenant.

« Après toutes ces années, je peux sentir les êtres comme nous. C’est grâce à cela que j’ai su qui était le capitane, votre mère et ce que vous seriez sans aucun doute. Hier soir, j’étais sur les docks et je peux vous jurer que je n’ai reniflé rien qui puisse nous mettre sur la piste des Lycans. Cependant… »

« Oui ? »

« Je ne veux pas vous effrayer mademoiselle. »

« Allons donc Harry ! Ce sont les ignorants qui ont peur, pas ceux qui savent. »

« Si vous-le-dîtes…Ce que je peux vous affirmer, c’est que j’ai flairé une odeur…de mort-vivant…de cadavre animé. Enfin, vous voyez ce que je veux dire. »

« Vraiment ? Vous en êtes certain ? »

« Avez-vous bien examiné le cou de cette pauvre victime ? Ne vous fiez pas seulement à votre vue. »

Mary Ann secoua la tête pour chasser l’étrange atmosphère qui régnait autour d’eux. Un vampire près de ses bateaux ? Elle en doutait fort. Pourtant, elle ne put refouler sa curiosité et s’assura qu’il n’y avait personne dans les alentours, avant de retirer ses gants et de presser ses doigts du pouls jusqu’en bas de la gorge. Elle frémit sous le contact des diverses marques. Quelque chose ou plutôt deux choses marquèrent son attention. L’homme, malgré toutes ses blessures, ne baignait pas dans son sang et on en trouvait en très petite quantité sur sa peau. À vrai dire, exsangue était le mot adéquat pour le décrire. Deuxièmement, deux empreintes bien singulières se moulaient sous les doigts de la jeune femme. Elles avaient été laissées par des crocs, sans aucun doute. La jeune femme essuya ses doigts sur le revers de sa jupe et son visage prit une teinte grave. Le marin se contenta de prendre appui sur une caisse abandonnée dans la pagaille suivant la monstrueuse découverte du matin.

« Ainsi, conclue la jeune femme d’une voix posée, vous aviez raison. Nous avons bien affaire à un vampire. Mais pourquoi a-t-il laissé le résultat de sa chasse aux yeux de tous ?»

« C’était peut-être une jeune sangsue. Elle a pris panique en voyant ce qu’elle avait commis et a décidé de camoufler son acte. »

« Vous n’avez pas l’air de trop apprécié les vampires. Et, je me demande, pourquoi avoir imité les lacérations causées par…nos griffes ? »

« Quel lycan digne de ce nom, grommela Harry, apprécierait un vampire ? Sachez ma petite demoiselle que nos deux races n’ont pas été conçues pour s’entendre, mais pour s’haïr mutuellement. Pour ce qui est de votre dernière question, j’en n’ai pas la moindre idée. Comme si j’étais dans la tête de ces créatures. »

Le marin rajusta sa chemise pour cacher son air dédaigneux et fit mine de s’en aller. Mary Ann le retint d’une dernière interrogation :

« Où avez-vous donc appris à causer ainsi ? Ce n’est pas le langage qu’utiliserait habituellement un…un… »

« Un moins que rien ? Un vulgaire marin ? Vous devez comprendre miss Wickford qu’il ne faut n’en tenir compte qu’aux apparences. Le plus pauvre des roturiers peut être moins simplet que le riche propriétaire. De plus, comme vous, j’ai eu la chance d’avoir un précepteur à mes côtés lorsque j’étais gamin. Au revoir, mademoiselle et faîte attention à ce que dissimule la nuit. »

Sur ces paroles, le vieux loup de mer laissa la jeune femme à ses méditations et quitta le décor, pareil à un fantôme des mauvais jours. Mary Ann plongea son regard dans l’écume des vagues. Dès ce soir, il lui faudrait renouer avec certains contacts. Il était hors de question qu’un évènement de ce genre se reproduise...





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MessageSujet: Re: Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé]   Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé] EmptyVen 7 Oct - 21:10

Bonsoir, la fiche ta fiche est en cours de lecture, tu auras des nouvelles très bientôt.

Bonne soirée ~
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MessageSujet: Re: Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé]   Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé] EmptyMer 12 Oct - 13:21

Bonjour à toi et Bienvenue !

Ta fiche est très émouvante et bien ficelée malgré quelques fautes d'inattention. Pour ton information tu es donc une infant car étant le rejeton d'un loup et d'une humaine ^^
Je ne peux que te valider jeune lycanne et te souhaite la bienvenue parmi nous !

Pour ta classe je voyais plus une baronne si cela te convient bien sur Wink

Je t'invite à créer ta fiche de liens, ton journal de rp et à fouiller parmi les demandes de rp s'il n'y en aurait pas une qui t’intéresserait Wink

Enjoy ♥️
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MessageSujet: Re: Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé]   Mary Ann Wickford, la fille du Capitaine [Terminé] EmptyMer 12 Oct - 23:25

Tout d'abord, merci pour la validation.=D

Ensuite, ma classe me convient très bien. Donc, je te remercie une seconde fois. Smile

Pour ce qui est de ta précision, je ne crois pas que mon perso soit un infant. Je n'ai pas du faire mon histoire assez claire, désolé...Ce que je voulais plutôt dire est que Mary Ann est la fille d'un lycan et de la "créatrice" de ce même lycan. Ses deux parents sont des lycans, mais l'un d'entre eux a été mordu par l'autre.
J'espère avoir été plus claire cette fois-ci.^^



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