[i]Il était tard. Le soleil rasait la terre colorant le monde d’ocre et d’orangée. Une brise fraîche parcourait la plaine et emportait avec elle les jeunes pousses des champs de blés. Leurs épis fragiles, ainsi balancés par les doux ressacs donnaient l’impression de saluer d’une dernière danse l’astre mourant. Confortablement installé sur sa selle, les narines pleines du parfum empoisonné des nuages en feux, Nathan s’imagina un instant pouvoir embrassé le ciel. Il n'y avait plus beau paysage à ses yeux que celui de ses plaines immolées, aux ras dés quelles volaient les rapaces affamés. Pour un peu, il se serait cru en enfer. Il y eut un bruissement au creux des fourrés et sous lui sa monture piaffa, nerveuse, piétinant dans la poussière brûlante du chemin chauffé à blanc par les multiples passages des convois de la journée. Le jeune homme raffermit sa prise sur les rênes et écouta d’une oreille distraite les grillons se mettre à chanter. La nuit tombait. D'un coup de talon sec, il éperonna son pur sang nerveux et partit, poursuivit par la lumière déclinante du soir.
-Oh-oh…La voix de Nathan sonna rauque, en ce mois d’Août. Il avait passé la nuit à chevaucher et si l’après midi serait affecté d’une chaleur suffocante, la rosée matinale n’était en revanche pas pour l’aider à raviver ses membres engourdis. Frigorifié, il mit pied à terre et eut un sourire reconnaissant envers son cheval dont il flatta les flancs moites d’une main douce. Le canasson s’ébroua sous la caresse et s’en alla au petit trot en direction des écuries, où, devait l’attendre le palefrenier familial des EastWood. Nathan songea au vieil homme un peu bourru -éternel levé parmi les coqs- avec une pointe de compassion. C’était un personnage robuste, à qui, l’âge faisait honneur malgré un manque indéniable de classe et de charme. Sa mère s’obstinait à lui refuser l’accès du manoir en dépit de ses loyaux services et il n’y avait que les fêtes chrétiennes pour la dérider assez, au point de laisser le gueux partager leur repas. Un acte qu’elle prétendait charitable, là où, il n’y avait qu’une vicieuse hypocrisie et le désir, de faire valoir sa générosité auprès des propriétaires du comté voisin. Il démit ses boutons de manchettes, d'un geste sec. Dans son dos, un lourd battant grinça. Il avait à peine fini d'ôter ses gants qu’une fusée blonde lui sauta à la taille, les yeux pétillants.
-Grand frère !! –claironna-t-elle accrochée à son cou.
-Marie-Jeanne ! –répondit-il d’un éclat de rire clair alors qu’il l'accueillait d’un bras ferme.
-On peut savoir où tu étais passé ? Te rends-tu comptes de la torture que j’ai subie durant ton absence ? –lança-t-elle d’un ton courroucé, démentit par son adorable sourire.
-Pardonne-moi, j’ai eu une affaire à régler.–se justifia-t-il, ses lèvres se posant sur le haut de la tempe juste en dessous d’une boucle blonde à la forte fragrance cannelée.-
-Oui, avoue plutôt que tu as dépensé une fortune pour obtenir, encore, le droit de lire un de ses vieux ouvrages que toi seul peut passionner ! –contra l’adolescente suspicieuse, avant d’être reposée au sol.
-Peut-être. -admit-il-
N’est ce pas là le parfum de Mère que tu portes ? –souligna-t-il ensuite, le sourcil haut-
Et, je te trouve bien matinal ! Maman a pourtant précisé en début de semaine qu’il ne te serait pas nécessaire de te rendre au marché de Nantes, ce samedi.-On a qu’à dire que tu n’es jamais parti avec une bourse pleine et, tu assureras à Maman qu’il y avait un besoin urgent de brioches. –minauda-t-elle d‘un froncement de nez craquant-
-Évite de prendre Arabie, il vient juste de rentrer et ne supporterait pas un nouveau voyage. –déclara Nathan en guise d’assentiment.-
-Je me contenterai donc, comme toujours, de cette vielle bique d'Arsenic. –fit-elle feintant le désespoir avec hilarité.-
Au faite, papa et maman sont levés. Ils se disputent depuis hier soir. Je te préviens, on se croirait presque sur le front. Essai de ne pas prendre une balle perdue!-Au quel cas, je pourrais compter sur toi et tes bons soins, non?-Alors là, ça tiens du fantasme!C’est avec un plaisir gâché que Nathan retrouva la demeure aux papiers peints crémeux, ses meubles blancs poncés et les grandes toiles de ses couloirs sinueux. En temps normal, chacun de ses retours étaient ponctués d'une longue heure de détente qu’il dédiait à la décoration artisanale car, l’activité conférait à son esprit une sérénité douce. Néanmoins, aujourd’hui, établir une atmosphère apaisante lui serait –à l’évidence- impossible. Les étages entiers résonnaient des cris stridents de ses parents vociférant injures sur injures. Si les disputes conjugales étaient rares, elles avaient le don de briser les tympans et faire trembler les murs. Au vu de l‘entrée, il apparut vite que les domestiques avaient lâchement fuis la tempête pour regagner leur propre appartement, isolé, aux abords des paddocks. Nathan les envia. Il aurait très bien pu repartir s'il n'avait pas été la personne la plus amène de calmer la querelle de Mr et de Mme EastWood. Un rôle qu'aucun ne voudrait et dont il se fit urgence lorsqu’en haut une porte claqua à en sauter sur ses gonds.
-Tu n'es qu'un inconscient. Un vieux cochon borné entrain de nous conduire à notre perte!-Moi, inconscient?! Espèce de sale chouette aigrie! C'est tes dons au nom de dieu qui nous mènent à la faillite, plus que tout le reste!!! -Ces dons, nous offre la grâce divine!!! Ils sont un bien maigre cadeau en échange d'une place, auprès du seigneur!-Foutaise! Ces mêmes dons vont nous faire finir clochard! Tu entends, presque nouvelle gueuse?!! Si tu continues, c'est sous un pont que tu dormiras!!! -Ne blasphème pas sous ce toit!!! Tu parles, tu parles!! Mais, si tu n'avais pas passé ton temps à t'engraisser, au lieu de gérer les rendements, on n'en serait pas là! -lâcha Evelyne EastWood, impérieuse.-
Elle se tenait droite et fière, au milieu d'une pièce ronde jonchée par les cadavres de feuilles d'acomptes et de taxes. Des pages entières, noyées sous un flot de nombre qu'elle défiait de sa stature et déchirait de ses chaussures. Elle était divine. En face, Carlton EastWood, derrière son bureau en hêtre noir semblait suffoquer sur place, le visage d'un rouge flamboyant et les lèvres frémissantes de postillons. On eut dit une bombe prête à exploser.
-Je devrais te dénigrer pour ton insolence! -cracha-t-il.
-Ton lit serait bien froid. -murmura-t-elle, après quelques minutes.-
Carlton s’effondra dans son fauteuil sans crier gare.
-Je sais.-souffla-t-il.-
Par l'embrasure de la porte, Nathan put voir la longue silhouette de sa mère se mouver et venir poser sa main ternie par l'âge sur l'épaule de son père, qu'elle serra, en un geste pleins de force. Jamais encore, ses parents ne s'étaient réconciliés de façon si docile. La situation en était-elle à ce point dramatique?
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Un mois plus tard.… L'ambiance était tendue. Autour de la table à manger, il n'y avait que le raclement grinçant des couverts dans le fond des assiettes et le frottement des jupons sur les chaises en osier pour percer le silence. Pas un n'avait dé serré les lèvres au cours du dîner et les échanges de mondanités avaient étés oubliés, comble de la vulgarité. Nathan n'osait même pas interpeller le majordome pour réclamer une carafe d'eau. La gorge sèche, il se forçait à mâcher une tarte âpre au goût pâteux. Il s'y cassait les dents. A côté de lui, Marie-Jeanne abordait un visage terne, d'un blanc terreux et maladif. Il avisa du coin de l’œil les poings serrés sur la nappe et la manière dont le couteau de la jeune fille avait été placé, pointé en direction du faciès courroucé de leur mère aux allures toujours aussi commodes. Venait Carlton, détaché de la masse des mines renfrognées par une grimace satisfaite qui rappelait celle du travail bien accompli. Nathan retint un rire ironique. Il savait d'où venait l'enjouement de son père pour la tablée, à qui, il n'avait plus fait honneur depuis une vingtaine de jours. Le goinfre les croyait tirer d'affaire. Il était persuadé que le fil ténu qui maintenait ses richesses à flot venait de prendre un double pli. C'était d'une naïveté telle, que Nathan lui en aurait donné des claques. Les sourcils froncés, il émietta un bout de pain entre son pouce et son index.
-Vous pensez qu'il y a une chance d'obtenir plus de fonds, par ce biais?
-En effet. Ce qu'il vous faut, c'est faire fructifier les terres et les biens.
-Je comprends, mais je crains de n'être guère bon en affaire.
-C'est pour ça que je suis là, Mr EastWood. Pour vous aider.
-Allons, Mr Richardson, je ne sais comment vous remercier. Je vous en prie, appelez-moi Carlton.
-Seulement si, votre charmant fils accepte de m'appeler Daniel.
Les prunelles d'un gris sombre vinrent le fixer, impénétrables. Nathan se crispa et lui rendit un regard froid, signe qu'il n'était pas dupe. Il était midi. L'auberge où siégeait cette petite réunion embaumait une agréable odeur de miel et d'alcool. Le tout dans un cadre viril, au cœur duquel, on se détendait sans mal sous le joug de l'hydromel et de la bonne pitance. ''Tout à fait le genre de père.'' songea-t-il, alors qu'en face l’éphèbe n'avait pas cillé d'un cil. Daniel Richardson, lui avait été présenté un peu plus tôt comme un nouvel associé et, surtout, une merveilleuse solution à leur problème financier. C'était un jeune comptable bien fait de sa personne, qui, en dépit d'un avenir prometteur à Paris, préférait s'adonner à aider les vielles familles fortunées de la campagne. «Une noble tâche!», avait acquiescé son père ravi de l'aubaine. Daniel s'était révélé un messie! Que-dire, un ange!
''Ou quand Satan frappe à votre porte...'' se chuchota le brun.
Le nez plongeait dans sa chope de bière, il manqua le sourire amusé de son interlocuteur qui insista:
-Puis-je, Nathan?
-N'est ce pas, maintenant fait? -déclara-t-il d'un ton neutre, n'en pensant cependant pas moins.
Il n'aimait pas Daniel. Ses intentions louables transpiraient la mauvaise foi. Sa famille l'avait éduqué dans la piété de Dieu. Il priait tout les jours à l'église, récité les commandements divins, la bonne éducation et condamnait les péchés. Mais il les savait ancrés, présent et pourrissant dans l'esprit des hommes. Il ne croyait pas aux actions dénuées d'intérêts. En outre, les sous entendus significatifs à son égard ne le laissaient pas de marbre et voir son père les ignorer, pire, les encourager, le dégoûtait plus sûrement que le reste. De toute façon, il n'en était guère étonné, il n'y avait que sa mère pour s'enhardir corps et âme dans le véritable prêche.
-Ne soyez donc pas si froid, Nathan. Je vous assure que vous êtes entre de bonnes mains.-susurra l'autre d'une voix si chaude qu'il en eut des frissons.
-C'est bien ce qui m'inquiète. -répondit-il hargneux-
-Nathan !-tonna Mr EastWood, la mine déconfite et sévère.-Veuillez excuser son impolitesse, Mr Richardson.
-Aucun souci, c'est charmant.-assura ce dernier dans un sourire canin.--Tu n'as pas le droit!!L'intervention brusque de sa sœur le fit sursauter. Elle s'était levée d'un bond et le fracas de sa chaise sur le sol venait de briser la pesante quiétude. Il observa avec un soupçon d'effroi ses épaules secouées de léger spasmes.
-Je refuse d'y aller!!! Tu ne peux pas m'y obliger! -hurla-t-elle, bouillante d'indignation mal contenue.- Je n'ai pas encore 15 ans!-Tu as bien assez. Le couvent est un endroit dés plus respectable et il t'engagera sur une voie, autrement plus noble que celle d'artiste. -trancha la voix glaciale d'Evelyne.- -Je ne veux pas, je ne veux pas.-sanglota-t-elle au bord de l'hystérie-
Je te dis que je ne veux pas!!!!-Que m'importe tes caprices. -soupira leur mère portant à ses lèvres une tasse de thé froid.-
-Maman!!!!-SILENCE!!! Ce n'est pas discutable!-s'impatienta-t-elle.-
-Je te jure de prier tous les jours pour que tu ailles brûler en enfer!!!Sur ces paroles odieuses, elle s’enfuît à l'étage abandonnant ses parents scandalisés et lui impuissant.
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Nathan se frotta l‘arrête du nez, les épaules basses. Des cernes d’un gris-noir s’étaient creusées au coin de ses yeux et abîmaient ses traits d’une expression de profonde fatigue. A raison, car cela faisait bien une semaine que le sommeil le fuyait comme la peste. Au manoir ses nuits étaient longues, blanches, parsemées de cauchemars et de vide. Marie-Jeanne n’avait daigné sortir de sa chambre -fermée à double tour- depuis l’incident. Les plateaux qu’on déposait devant sa porte étaient souvent retournés pleins et les grands rideaux pourpres de sa baie vitrée restaient obstinément clos. Il avait failli croire au suicide, tout juste rassuré, par les murmures qu’il distinguait au travers des cloisons fines séparant leurs suites. Il savait qu’un homme venait lui rendre visite le soir, mais ne s’était permit aucun commentaire et n’était pas intervenu. Sa sœur ne lui aurait jamais pardonné, d’autant plus, qu’il ne s’agissait pas là d’une simple conquête passagère. Durant des mois, il avait lui-même participer à forger cette union acceptant les trajets intempestifs de sa cadette sans se préoccuper de savoir avec qui, ni où, comment et pourquoi. C’était un jeu dangereux qu‘il aurait du interdire en tant qu‘adulte raisonnable. Cependant, Marie-Jeanne avait un caractère fougueux et lui un esprit pragmatique. Il pensait que la surveiller ne ferait que braquer l‘adolescente et la pousser à chérir ce premier amour dans la fougue et la passion. Avait-il été trop laxiste? Il se promit de réparer sa faute et parler à Marie-Jeanne avant que l’idée saugrenue d’une fugue ne s’affermisse chez elle.
-Mr EastWood? Pardonnez-moi de vous interrompre, mais il est midi. Comme pour confirmer, une horloge boisée se mit à sonner d’un gong macabre. Nathan abandonna le bout de sa plume encore encrée au bord d’un parchemin gratté et referma un imposant volume. La couverture gondolée, sous le poids des pages ravalées, émit un délicat bruit de craqûre. Il s’agissait d’un ensemble de textes rapporté d’Afrique, qu’il étudiait à ses heures libres. L’ensemble prenait les trois quart du petit bureau sur lequel il était installé et s’il apparaissait grotesque, relier chaque feuillet fragile avait du demandé un savoir faire précis. Il aurait souhaité posséder pareil merveille.
En face, Jean Rupert -l’archiviste fripé de la brocante- lui offrit un sourire édenté par-dessus son nez crochu. Il lui avait déjà accordé une heure de plus que la norme, un acte d’une générosité rare dont il ne pouvait abuser. Il éteint sa bougie d’un souffle résigné et quitta la réserve. Sa seule hâte était de revenir demain.
-Qui veut des fleurs? Pas cher mes fleurs!
-Oui, vous savez, à ce que j’ai entendu dire sa fille est une…
-Mon avis, est que leur bière est encore meilleure qu’à Paris!
-Vous n’êtes pas sérieux, ils n’ont aucune chance face à l’équipe du…Les bribes de conversations participaient à faire vivre le charivari des avenues bruyantes. Elles s’égrenaient les unes sur les autres, en concurrence avec le tintamarre assourdissant des carrosses et des cris. Il en éprouvait une migraine carabinée et savoir que l’écurie qui gardait Arsenic, se trouvait à l’autre bout de la ville en ajoutait à sa mauvaise humeur. C’était dans ces moments-là qu’il était heureux de vivre un peu éloigné de la civilisation, au milieu de la campagne familiale. Incapable de supporter davantage la cacophonie stridente, il tourna à l’embranchement d’une petite venelle et s’enfonça dans ses méandres. Il détestait ces dédales sales où se reflétait la misère, domicile des malfrats et des rats. Des endroits infréquentables, qui donnaient la chair de poule.
-Tais-toi! Te rends-tu compte de ce que tu as fait?!-Je t’en prie, calme-toi. C’était une erreur.-Me calmer?! Me calmer? Je devrais te tuer pour ton incompétence! Un glapissement retentit et il se figea. Au tournant, il entraperçu deux ombres s‘agiter. Un règlement de compte à ne pas s’y tromper. Il n’y avait vraiment rien qui vaille dans ses parties basses. Les affaires de meurtres y étaient courantes et pour cause, Nantes, n’avait pas de système juridique probant, amenuisé au profit de la capitale française. Loin d’être héroïque, il fit un pas en arrière. Il serait même parti aussi sec, si un nom connu n’avait pas claqué dans l’air:
-Daniel! Je t’en supplie. Je l’aurai, la prochaine fois. Je n’échouerai pas, je te le promets! -Tu sais ce qui va arriver si on échoue? Tu le sais?! Hier soir, c’était notre chance de l’avoir!-Je te promets qu’il n’aura pas le temps de s‘échapper. Je le retrouverai avant!!-Dégage, vite! Et ne me déçois pas! Il y eut un couinement craintif et Nathan s’écrasa derrière son muret. Seigneur, il avait reconnu Richardson. Son père traitait avec un assassin! Les mains tremblantes, il sentit ses jambes pris d’une dérangeante mollesse et se força à reprendre contenance. Rester planté n‘amoindrirait pas sa glauque découverte et accentuerait sa prise de risques. Il inspira, fiévreux.
-Alors, on espionne?-chuchota une voix menaçante-.
Une paume forte s’abattit dans son cou et l’enserra à l’étrangler. Etouffé par cette poigne monstrueuse, il crachota et se laissa aplatir le long de la façade rocheuse qui avait été son refuge, pour quelques minutes. Les prunelles anthracite de Daniel le toisèrent d’une haine farouche. Elles le rendaient méconnaissable, tétanisant. A sa honte, il en eut tellement peur qu’il faillit humidifier ses dessous.
-Que fais-tu ici? Tu me suis?! C’est ton maître, c’est ça?! Tu pensais qu’il suffisait de ressembler à une biche pour me tromper?! Sale catin! Tu pues! -cingla-t-il enragé.-
- Je.ne ah…pas…parler…ah ne voit pas……vous…malade…-baragouina-Nathan en réponse, le teint virant au violet.
-Tu?…-….pas….moi.L’expression de Daniel s’adoucit soudain et il le relâcha une seconde après, livide. Le corps de Nathan s’échoua à terre d’un mouvement mat. Il toussa, avala une goulée d’air gourmande et s‘étouffa presque avec sa propre salive.
-C’est une méprise!-se précipita-Daniel, dirigeant une main rassurante vers lui qu’il gifla.
-Ne me touchez pas. Surtout, ne me touchez pas. Et, éloignez vous!-déblatéra-il, terrorisé en se dégageant le plus loin possible du comptable.
-Nathan, ce n’est pas ce que tu penses. Je t’assure que je ne voulais pas.-reprit-le jeune homme avançant d‘un pas.
-N’approchez pas!!!!!!!Il se releva et détala hystérique jusqu‘à rencontrer un cul de sac. Il caressa sa gorge douloureuse et fit demi-tour…
-Nathan.…Frôlant l’arrêt cardiaque. Daniel lui saisit le poignet et il se crût prêt à éclater en sanglot. Comment cet homme avait-il pu l’intercepter aussi vite?! Comment pouvait-il seulement ne pas l‘avoir entendu?! Bordel, de sainte miséricordieux!!!
-Lâchez-moi! Lâchez-moi!! LACHEZ MOI!!!! -Nathan! Calme-toi!!! Je ne te ferais rien!!! Nathan!!!! TU VAS TE CALMER, OUI?!!!Le ton sauvage eut le don de le statufier. Un hurlement muet coincé dans la trachée, il observa Daniel prendre de lentes respirations, la mâchoire saillante de colère.
-Ce n'était pas volontaire. J’ai fait une erreur.-tenta-t-il de s’excuser, en vain.-
-Très bien. Maintenant, lâchez-moi. -rétorqua Nathan apeuré.
-Ecoute, s’il te plait, je t’assure que…-J’en ai rien à faire!! Laissez-moi partir! -asséna-t-il la fin de sa tirade se perdant dans les aigus.-
Daniel le toisa durant ce qui parut une éternité, puis le relâcha sans s‘éloigner.
-Nathan…je t’en prie. -aboya-t-il en le voyant bondir hors de sa portée.-
Ecoute-moi….Nathan hésita, mais finit par concéder distant:
-Pourquoi m’avoir étranglé? -J’ai senti une odeur et…-Une odeur? -répéta-t-il, ahuri.-
C’est pire que ce que je pensais. Vous êtes complètement frappé!-NATHAN! Il faut que tu m’écoutes…Non, ne t’en vas pas, je ne m’approcherai pas. Ecoute…Ecoute. Quelqu’un a-t-il eu un comportement étrange chez toi, ces derniers jours? Nathan chassa vite l’image de Marie de son esprit et donna la réplique, venimeuse:
-Non. Jamais. A présent je pars et si vous osez ne serait-ce que m‘approcher, je n‘hésiterai pas à vous tuer.---
Nathan descendit d’Arsenic d’un bond leste. Il était encore chamboulé par sa mésaventure. Débraillé, il tenta de remettre en ordre ses habits et s’empressa jusqu’au manoir, étonné de n’entrapercevoir aucune lueur derrières ses imposantes fenêtres. C’était pourtant l’heure du dîner. Il découvrit ainsi un hall plus silencieux que la morgue. Pas un serviteur, pas âme qui vive, les couloirs étaient déserts. Il frissonna et s’empara d’un chandelier éteint avant de s’avancer, inquiet.
-Je n’aurai définitivement pas du me lever.-se murmura-t-il, dans une piètre tentative pour se rassurer.-
A l‘intérieur, les couloirs étaient saturée d’une angoisse lourde et il arpentait plus qu’il ne marchait, tentant d’ignorer les coins sombres que la pale luminosité de la lune découpait en ombres effrayantes. A cet instant, respirer même semblait être devenu pénible et dérangeant, comme si le simple fait d‘expirer n‘avait pas sa place entre ses murs qu’au dehors les branches fouettaient d‘un bruit sourd. Angoissé, il avisa la porte du salon entrouverte, branlante et grinçante d’une mélodie lugubre. Un signe peu engageant par une nuit sinistre. Sa prise sur le chandelier se resserra et il y pénétra à pas de loup. La pièce était glacée, balayée par un vent nocturne qui faisait danser les rideaux tel le spectre fantomatique d’un ballet classique. Nathan avança jusqu’à atteindre un petit meuble -celui qu’on utilisait pour rédiger les lettres- et écarta d’un mouvement rigide les tentures mouvantes. La fenêtre de derrière était fracturée au niveau du carreau gauche, il y manquait un angle. Il poursuivit son exploration vers le centre trop noir pour y distinguer quoi que ce soit sans s’approcher.
-ah…Le souffle avait été faible, mais assez fort pour qu’il panique et s‘emmêle au point de chuter à terre sur un parquet enduit de liquide visqueux. Dans son dos, il y eut un autre hoquet vomitif et il haleta d’une voix hachurée et faiblarde:
-Qui est là?Seul un glouglou écœurant lui répondit. Il tâta pour se redresser et sa paume rencontra un bras mou. S’il n’avait pas alors reconnu au poignet glacé le bracelet de Marie-Jeanne, sans doute se serait-il évanoui sous la pression.
-Hey, Marie…-essaya-t-il péniblement-
Silence.
-Marie, je t’en prie répond moi.-ajouta-t-il après un temps, chassant la peur.
Il se releva à genoux. Ses doigts rencontrèrent bien vite les boucles blondes, crasseuses. Il descendit et trouva le visage, devina les paupières ouvertes, caressa les joues, la bouche et le menton gelé puis finit sur une gorge suintante, tellement glissante. Son cœur cessa de battre.
-Oh, Marie-Jeanne…Non…non, ce n’est pas vrai. Non, Marie-Jeanne ma puce répond moi…je t’en supplie, je t’en supplie…-sanglota-t-il de plus en plus fort.-
MARIE JEANNE NOM D’UN CHIEN, REPOND MOI.Il recueillit esseulé la jeune fille désarticulée, qui, dans ses bras, se contenta de s’affaisser en bonne poupée de chiffon, morte.
-Marie-Jeanne!! Marie-Jeanne, pitié, pitié! Seigneur, non…Non, non, non!!!-continua-t-il encore, priant pour que ses supplications déchirantes transpercent le ciel. Mal lui en pris.
- « Il » ne répondra pas, Nathan. « Il » ne pourrait pas l’aider même s’il le voulait et toi non plus tu ne peux pas la sauver, c’est trop tard. Elle est déjà perdue.La longue silhouette de Lady EastWood se profila devant l’encadrement de la fenêtre. Il ne l’avait pas vu entrer.
-Maman?-bredouilla-t-il indécis-
Mais…qu’est-ce que…Marie Jeanne, la sauver…il faut appeler, le docteur…pourquoi tu…Il y eut un claquement de langue agacée. De là où il était, il ne pouvait distinguer son expression. Il la regarda balancer sa tête de droite à gauche et compris qu‘elle-même ne le voyait pas du tout.
-Eloigne-toi, Nathan.-reprit-elle.-
Tu ferais mieux de ne pas rester auprès du cadavre de ta sœur, ça va finir par te porter malheur. -Qu’est-ce que tu racontes?-demanda-t-il aigre et choqué.-
-Je veux dire qu’il le fallait, mon fils. Ta sœur était devenue dangereuse pour nous.Un grand froid s’installa dans son ventre. Il n’était pas sur de vouloir comprendre la portée de ses mots. Insidieusement, quelque chose s’infiltra entre ses entrailles, latent, lent.
-C’est-à-dire? Explique-moi Maman. Comment Marie-Jeanne pourrait être dangereuse?-demanda-t-il, surprit de ne pas balbutier des mots incohérents.
Sa mère se retourna dos à lui, fixant le dehors. Elle s’exprima d’un ton cassé, ne relevant pas le «pourrait» .
-Elle avait pactisé avec le diable. Nathan, tu dois comprendre que j’ai fait ça pour son bien. Tu ne le sais pas encore, mais le mal est partout.-Je ne comprends pas. Explique-moi. -répéta-t-il-
Que veux-tu…-Je dis que Marie-Jeanne était devenue un monstre -coupa-t-elle, brusque, avant de poursuivre profitant de son ébahissement.- Je savais qu’elle rencontrait un homme. Ces derniers jours, son comportement m’a rendu folle d’inquiétude! Enfermée, à ne presque rien avaler, ni boire. Et, enfin, tout à l’heure, elle est sortie, venue me voir en pleurs suppliante.-Suppliante?-Il y avait ces marques sur sa gorge. Son teint cireux. Elle disait qu’elle avait peur. Son amant allait venir la chercher et elle ne savait plus quoi faire. Elle voulait lui échapper. -affirma-t-elle avec conviction-
Je ne pouvais rien faire, il était évident qu‘elle s’était fait empoisonner.-Elle te suppliait et tu n’as même pas tenté de l‘aider? -souffla-t-il d‘un murmure feutré-
-Je l’ai aidé! Je l’ai tué avant qu’elle ne perde toute humanité! Je l’ai sauvé avant qu’elle ne devienne un monstre!! Tu comprends ?! -s’insurgea-t-elle.-
-Tu as tué ta fille, parce qu’elle était un monstre?-Oui, Nathan. Oui, pour la sauver.Nathan posa sa main sur le cou de Marie-Jeanne. Ses doigts rencontrèrent un morceau de verre épais sur lequel il s’entailla le pouce. Il devait avoir sectionné l’artère et y être resté fiché.
-M’aurais-tu sauvé moi aussi, Maman? Parce que tu m’aimes?-demanda-t-il d’une voix haute, couvrant le léger chuintement produit par l’éclat de carreau quand il l’extirpa du corps.
-Oui, bien sûr.-Dans ce cas, si tu devenais un monstre. Par amour, ne devrais-je pas te sauver aussi?-Eh bien, si j’en devenais un, oui.-Vraiment?Evelyne EastWood ouvrit la bouche.
-Oui.---
Nathan s’effondra et sous lui l’herbe revêtit un habit rouge. Le monde était d’un flou à le rendre nauséeux. Tout tanguait. Il cessa donc de regarder. Son sang partait. Sa chemise n’était plus qu’un chiffon humide. Il était seul, à semi-conscient entrain d’agoniser. Cette constatation acide ne lui tira pas une larme. Il avait déjà le cœur sec. Cela ferait beaucoup de jasements au village quand on découvrirait son cadavre. Il se demanda si son père était vivant entrain de visiter un bordel ou mort égorgé et il sentit une bouffée de haine monter. Il haïssait l’idée que Carlton soit en vie, à se satisfaire quand lui allait mourir, vidé de son sang par une hémorragie.
Un grondement retentit proche et soudain, une fourrure chaude frotta à ses jambes. Nathan rectifia le tir: Il allait finir dévorer. Cela devait être douloureux, très… Une haleine chaude heurta ses joues griffées à vif et sa bouche fendue. Par bravade et curiosité morbide, il rouvrit les yeux.
Daniel Richardson…. -pensa-t-il désabusé avant de s’évanouir. Le Gévaudan aussi avait les yeux gris.
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Voilà, j’ai enfin pu poster l’histoire. ^^ Avant, de laisser ma fiche aux soins des admins, j’aimerai préciser que j’ai laissé de nombreux points qui doivent paraître flous, mais que cela est volontaire!
-Qui cherchait Daniel? Qui était son associé? Qui était-il vraiment lui-même?
-Qu’est-il vraiment arrivé à Marie-Jeanne? Qui était son amant?
-Qu’est devenu le père de Nathan?
Ce sont des questions sur lesquelles je veux jouer en rp. De même, j’étais censée écrire une partie de surface sur l’après, cependant j’aimerai garder cette partie pour le journal intime de mon personnage . Je suis désolée si mon histoire fait rapide et un peu bâclée, j’ai essayé de faire remonter la série d’évènement la plus importante pour Nathan est c'est celle qui précède sa transformation.
Vu que c'est un espion chez les vampires, je compte ajouter à son journal un rp explicatif de sa situation actuelle. J'aimerai aussi faire des rp's flashbacks qui expliqueront comment il s'en est retrouvé là.
Ensuite, si jamais les admins se le demandent, c’est bien Daniel qui a transformé Nathan. J’aimerai d’ailleurs en faire un prédéfini et certains détails à son sujet en seront plus clairs. Je parlerais de son cas par mp le moment venu. (Ou avant si ça intéresse.)
Bref! Merci de votre patience. >_< En espérant, que ma fiche sera correcte et en ordre =).
Ps: Je fais référence au Gévaudan comme un clin d’œil, bien qu’à l’époque, l‘histoire de la bête du Gévaudan n‘existe pas encore. Ici, Nathan s’y réfère comme un autre nom donné au diable à qui ont prêté aussi, déjà, une forme de loup. (Si, mes sources Google sont fiables Xddd.)